Collection: Svetlana (Tkački Kutak)

Montenegro - Pljevlja,

Pljevlja, ville autrefois fierté industrielle du Monténégro, fait aujourd’hui face au départ des jeunes et à l’extinction des traditions, chaque main qui les préserve est plus que jamais précieuse. Dans cette ville, parmi les derniers gardiens d’un art ancestral — le tissage — se trouve Svetlana, une femme qui n’entrelace pas seulement des fils dans ses réalisations, mais aussi des émotions, des souvenirs et de l’amour.

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L’histoire de Svetlana et des fils qui gardent l’âme de Pljevlja

Svetlana, artisan au Monténégro à Pljevlja sur son métier à tisser.

Svetlana Živković (Crédit photo: RTCG)

Cette femme travailleuse et persévérante, soutenue fortement par sa famille, protège ce qui disparaît peu à peu : un savoir-faire qui, pendant des générations, a nourri et réchauffé les foyers monténégrins.
Autrefois, le tissage était le symbole de la richesse d’une maison. Aujourd’hui, alors que les villages se vident et que les métiers se meurent, ce genre d’histoires brille comme une braise sur un foyer éteint.
Svetlana se confie et nous parle des premiers instants :

« Mon histoire avec le tissage a commencé en 2006. En tant que mère de trois enfants, je réfléchissais à ce que je pourrais faire pour encore embellir ma vie, pour ne pas être seulement une femme au foyer. J’ai toujours aimé les choses inhabituelles, et le tissage m’offre des possibilités infinies. Au début, ce n’était pas facile. J’ai eu ma première expérience auprès d’une femme qui travaillait dans la coopérative de tisserandes de Dragačevo, puis je me suis perfectionnée toute seule. Même si mes réalisations sont modestes, la satisfaction intérieure donne l’élan pour aller plus loin », raconte Svetlana.

Tapis gris, noir et blanc traditionnel en cours de réalisation sur un métier à tisser

Sans la compréhension et la patience de son mari et de sa famille,  dit-elle, il aurait été compliqué de concilier les obligations quotidiennes avec les longues heures passées sur le métier.

Pour elle, les foires et les expositions sont des lieux de rencontre entre les derniers artisans qui continuent à préserver la tradition.

« Aux foires et expositions, on retrouve toujours des artisans qui luttent pour faire survivre les anciens métiers, des gens qui produisent une nourriture saine et gardent le meilleur du passé. Ce sont de belles rencontres. Mes œuvres sont parties dans le monde entier : si je n’ai pas voyagé, mes ouvrages, eux, l’ont fait. Ils sont souvent achetés comme cadeaux pour des gens à l’étranger afin de leur rappeler leurs origines. Les étrangers sont plus enthousiasmés que les Monténégrins ! », raconte Svetlana.


Son premier outil fut un vieux métier à tisser de Dragačevo. Les débuts furent éprouvants, dit-elle, mais cette difficulté lui a ouvert une fenêtre sur le passé, sur les vies de nos arrière-grands-mères, grands-mères et mères, qui, malgré la peine, avaient la force incroyable de tisser toute la nuit ce qui allait nourrir et réchauffer leur famille.

« J’ai acheté mon premier métier à Dragačevo. Il était vieux, mais il m’a tout appris. J’ai alors pensé à nos grands-mères, arrière-grands-mères : combien elles ont dû peiner. Aujourd’hui, c’est plus facile, même si tout reste manuel, mais c’est plus simple. Pourtant, les vieilles femmes me demandent encore : quelle misère t’a poussée à tisser ? Pour elles, cela reste le souvenir d’un travail pénible. Moi, je le fais par plaisir. Elles, elles devaient travailler jusque tard dans la nuit après toutes les tâches ménagères », souligne Svetlana.

Le tissage est devenu son refuge, sa paix, sa prière silencieuse.

Tapis rouge traditionnel en cours de réalisation sur un métier à tisser

« La préparation en soi est exigeante, mais quand je m’assois au métier et que je commence à tisser, les pensées s’enchaînent, parfois une chanson, souvent une prière. C’est un vrai plaisir. J’aime les motifs, surtout ethno — ils sont ma source inépuisable d’inspiration. Pendant que je crée un tissu, l’idée du suivant arrive déjà », dit-elle.

Elle précise qu’il reste très peu de tisserandes au Monténégro. Le processus complet qu’accomplissaient autrefois les femmes — du ramassage de la laine à la teinture, au séchage, au cardage jusqu’au tissage — a presque disparu.

"Autrefois, nos femmes faisaient tout : elles teignaient la laine avec des feuilles de noyer, les faisaient bouillir, puis y mettaient la laine. Aujourd’hui, j’achète tout prêt. Cela n’existe plus : ni teinturières, ni cardeuses. Ce serait impossible à réaliser. Et pourtant, nos anciennes y parvenaient,
On ne peut pas vivre de ce métier, ajoute-t-elle. Mais il peut compléter le budget familial

. Avec une famille qui la comprend et la soutient, elle trouve plus facilement la force de continuer. Elle espère qu’un jour, peut-être, ses enfants voudront s’asseoir au métier : car il contient quelque chose qui dépasse l’économie — un héritage.

« C’était difficile au début, mais je n’ai pas abandonné. Je voulais être plus qu’une ménagère et avoir mon propre revenu. Et quand je pense à ce que vivaient les femmes d’il y a cent ans, je comprends leur force. Beaucoup de nos maisons aujourd’hui sont ornées de leurs œuvres. C’est une trace qui reste, la preuve que quelqu’un a vécu, travaillé, lutté et créé », conclut Svetlana.

Tapis, sacs, châles et autres textiles aux motifs traditionnels balkaniques réalisés par Svetlana

- Note personnelle -

Je remercie au nom d'Ethno Slava RTCG journal de presse Monténégrin qui a accepté que nous retranscrivions la traduction de leur article sur Marija.
Ainsi que Marija qui est d'une gentillesse infinie.

Ses créations